مؤسسة الشرق الأوسط للنشر العلمي
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Dans le roman La modification de Michel Butor, la structure narrative suit le trajet du personnage principal Délmont dans un train, de Paris à Rome, pour rejoindre sa maitresse. Le roman obéit donc à un déroulement linéaire, en temps réel, avec des descriptions détaillées des divers paysages rencontrés aux alentours du passage du train et des différentes interactions avec les voyageurs. Cependant, cette temporalité est fréquemment interrompue par des pensées et des réflexions qui interpellent le passé ou prévoient l’avenir. A ce niveau, on peut dire que la temporalité n’est pas stable, elle est tributaire du for intérieur du personnage. Elle témoigne aussi du désir de remettre en question les conventions du roman traditionnel et d’explorer les techniques du nouveau roman. A ce propos, Albérèse fournit l’explication suivante : Il n’existe plus alors, comme c’était le cas dans la théorie classique de la connaissance, un monde vu et un romancier voyeur, mais un ensemble complexe où les deux se mêlent . Cet entremêlement entre le monde intérieur et le monde extérieur donne une impression de discontinuité créant une expérience de lecture innovante. Le lecteur n’est donc plus préoccupé par la progression narrative, mais emporté par le flux chaotique des pensées du personnage et les différentes transitions qui apparaissent épisodiquement sans liens apparents entre-elles, sans pour autant perturber le déploiement normal de l’écriture. Ainsi, peut-on dire que la narration et ses différentes réalisations dans l’œuvre se marient parfaitement avec la description des différentes manifestations de la psychologie du personnage. Contrairement à la littérature traditionnelle qui s’intéresse fréquemment à la condition humaine, à la place de l’homme dans la société, qui aborde souvent des problèmes sociaux et politiques, qui décrit le monde et l’histoire, qui juge les civilisations et crée des thèmes universels, le nouveau roman remet en question ces préoccupations et cherche à privilégier l’individu, voire la psychologie du personnage. En fait, d’après Bernard Lalande : « La Modification est de tous les romans celui qui peut le mieux réduire nos habitudes de lecteurs façonnés par Balzac et par Flaubert » . L’oscillation entre le monde intérieur du personnage et son univers extérieur peut donc perturber les repères au niveau de la progression de l’écriture et aussi au niveau de la réception de l’œuvre. Loin de tout développement linéaire de l’intrigue, on décèle une succession d’histoires, d’images, de descriptions qui se fait de manière instantanées et même extrinsèques. L’écriture évolue par rapport à deux instances, la narration et ses différentes réalisations dans l’univers diégétique de l’œuvre et la description de la psychologie du personnage avec ses différentes manifestations en rapport avec les profondeurs de son d’âme. L’auteur assimile cette écriture introspective à « Une caverne » que le héros présente en lui et qu’il ne peut pas « boucher, parce qu’elle est la communication avec une immense fissure historique » (p. 276) Le lecteur doit donc appréhender les variations temporelles sous plusieurs angles. D’une part, les rapports entre temps d’énoncé et temps d’énonciation, et de l’autre, les aléas du temps psychologique et son rapport avec le temps narratif. L’expression à rebours serait probablement l’intitulé le plus approprié à cette problématique du temps, dans la mesure où la progression temporelle ne coule pas de façon linéaire. En fait, la linéarité opère au profit de l’espace, avec ce train qui poursuit son chemin, progressivement et continuellement, de Paris à Rome, sans brouiller l’itinéraire sollicité. Le temps, par contre, se présente comme un moyen adéquat à une pénétration psychologique mitigée où passé, présent et futur se rencontrent pour sonder une histoire purement humaine. Dans notre recherche on s’attachera à étudier le temps à partir d’une exploration interne de la psychologie du personnage. En fait, la présence toute subjective de ce dernier transgresse forcément la chronologie linéaire. La première partie sera réservée aux différentes agitations psychologiques du personnage qui dirigent le temps dans des orientations différentes de la temporalité conventionnelle, ce qui fait que le récit avance par retour dans le but de contourner des moments précis qui influent la personnalité du héros. La deuxième partie tire sa signification du lien étroit avec le psychologique et l’intersubjectif parce qu’elle se situe exclusivement au niveau des sensations indépendamment de tout ancrage temporel.